Il faudrait être de mauvaise foi pour ne pas reconnaître à Gilbert Tsimi Evouna la paternité de la métamorphose de Yaoundé depuis bientôt 5 ans. C’est vrai que plusieurs chantiers qu’on lui attribue sont des retombées concrètes des fonds issus de l’initiative pays pauvres très endettés (Ppte) ou de partenaires au développement. Mais le délégué du gouvernement auprès de la communauté urbaine de la capitale (CUY) a sa – grande – part de responsabilités dans les changements actuels. L’élan de modernisation tend certes à s’essouffler depuis quelques mois, mais l’homme a durablement marqué de son empreinte la vie de sa cité. Il y a une main qui travaille. Malheureusement seule, les autres administrations publiques observant un réserve apathique, inerte et sournoise. Administrateur civil dans une autre vie, Gilbert Tsimi Evouna est un infatigable laboureur qui a même fini par se transformer en bulldozer au fil des casses et des déguerpissements musclés. Un jour, il va à la rencontre de jeunes petits commerçants occupant les trottoirs au quartier Emombo. Il leur explique à quel point leur implantation est nuisible et même risquée. Ses interlocuteurs lui rétorquent qu’ils «se débrouillent» pour ne pas s’exposer au vice. Et l’interpellé de répondre, avec son accent châtié et nonchalant : «Cette fois, c’est Tsimi Evouna qui vous parle. La semaine prochaine, c’est le délégué du gouvernement qui viendra et il va tout raser.»
Il est comme cela, le premier édile de la capitale : volontaire, fonceur mais obstiné et autocrate. Ce qui est bon pour lui est bon pour les autres. Il passe outre l’avis du Conseil de la CUY. Ecarte de son chemin, et sans ménagement, les collaborateurs qui ne suivent pas le rythme ou qui pensent avoir à redire. Massacre les lois et règlements. Passe outre les appels à la retenue de la hiérarchie : il n’a de compte à rendre qu’à Paul Biya, qui l’a nommé. Et le fait qu’il demeure en poste vaut satisfecit du chef de l’Etat. Point à la ligne. Et c’est là qu’interviennent les maladresses, puis les gaffes qui finissent par ternir son œuvre. A Ntaba, zone populeuse et délabrée, il a rasé et éloigné des centaines de pauvres hères. Pour laisser fleurir l’herbe sauvage. En face de la Place Repiquet, il a démoli un marché qui rapportait beaucoup à la CUY en terme d’impôt libératoire et autres taxes communales. Il voulait y ériger une zone résidentielle, avant d’apprendre, après coup et ahuri, que le terrain était une propriété privée. A Tsinga, le camp Sic a volé en éclats. Il y prévoyait une cité moderne de 200 logements de cadres. L’entrepreneur s’est fait la belle sans demander son reste et le chantier, confié le 30 juillet 2008 à Timbal Immobiliare, s’est délabré avant même d’avoir démarré. Il a instauré le «sabot» pour discipliner les conducteurs d’automobiles. «Tsimi trop» Mais la mesure, salutaire au demeurant, lui vaut des plaintes pour abus divers et de lourdes amendes à son institution. On ne compte plus les conflits qui l’opposent à plusieurs prestataires qui s’estiment floués. Le directeur général de l'Agence de régulation des marchés publics (Armp) le rappelle au respect des procédures d'attribution et d'exécution des marchés publics, il rétorque que c’est la réglementation qui est bancale et qu’il faudrait plutôt blâmer ces dispositions qu’il trouve obsolètes. Afin que force reste à l’aloi. L’infatigable bâtisseur plante des boutiques partout où c’est possible. Bientôt, Yaoundé ne sera plus qu’un gigantesque supermarché détenu par la CUY. Des amis qui lui veulent du bien l’accusent de népotisme, eux qui voient sa main derrière des sociétés écran tenues par de supposés membres de la famille. Ces temps derniers, Gilbert Tsimi Evouna, que certains appellent désormais «Tsimi trop du Cameroun» (en opposition avec l’artiste Tsimi Toro du Cameroun), a ouvert un autre front de crise avec de proches collaborateurs. Et avec des méthodes staliniennes. En fin de semaine dernière, il mettait à la porte le receveur municipal de la CUY, Mme Ngo Ntelep, coupable d’avoir voulu regarder de trop près les nombreux groupements d’intérêts communautaires (GIC) dont les promoteurs ne seraient pas très éloignés de la famille du délégué. Elle voulait les soumettre, comme tous les prestataires de marchés publics, au paiement des impôts et taxes divers. Elle renâclait également à débloquer des fonds pour des mouvements du délégué dans la ville. Dans la même veine, la brave dame s’acharnait à vouloir nettoyer le fichier solde de la CUY dans lequel on dit que plusieurs retraités continuent d’émarger. Son bureau a été scellé, et l’entêtée remise à son administration d’origine sans même en référer aux ministres des Finances et de l’Administration territoriale et de la Décentralisation, qui l’ont nommée. En lieu et place, le super-maire de Yaoundé a, contre toute disposition légale, décidé d’y placer sa fondée de pouvoirs et son directeur par intérim des affaires financières et économiques, Anastasie Josette Zibi et Mbida Ntsama respectivement. Les nouveaux promus se sont permis de traîner les pieds, estimant la mesure illégale. Virés. Gilbert Tsimi Evouna, comme beaucoup de pionniers, doit se croire incompris dans son action. A l’heure où des villes brûlent ailleurs du fait de citoyens se sentant abusés par l’autorité publique, éjectant du trône, comme des malpropres, de petits pères de la nation qui se croyaient inamovibles, il gagnerait à se munir un extincteur pour ne pas carboniser celui de qui il tient son zèle.
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© Mutations - Félix C. Ebolé Bola
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